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Le blog d'Alain Boublil

 

TEC 10 : 1,22%

L’Agence France Trésor a publié ce matin son indicateur quotidien du taux d’intérêt à dix ans sur la dette française. Il est inchangé à 1,22% par rapport aux taux observés à la fin de la semaine dernière et inférieur de 12 points de base au niveau atteint le 11 juin. Ainsi, au plus fort de la crise européenne consécutive au refus du gouvernement grec de se soumettre aux injonctions, justifiées ou non, de ses créanciers, et d'en appeler à un référendum, la confiance des marchés financiers sur la dette française reste solide. Même si elle ressort en hausse par rapport aux points bas observés au printemps, la rémunération des titres français se situe au sommet de l’échelle en Europe et dans le monde. L’écart est de 40 points face à l’Allemagne, soit à peine plus que les 30 points  habituels, justifiés par la plus grande liquidité des bunds. Les gouvernements américains et anglais doivent payer, eux, des taux presque deux fois plus élevés, avec 2,37% pour le premier et 2,06% pour le second.

Ce matin, la France a encore émis pour plus de six milliards d’euros de bons du Trésor à des taux négatifs (-0,18% en moyenne), peu différents de ceux observés au cours du mois. Au total, depuis le 1er juin, sans aucune difficulté, bien au contraire, la France a levé 31,5 milliards d’euros de Bons à échéance de trois mois, six mois et un an. Depuis le début de l’année le taux d’intérêt moyen sur les émissions supérieures à un an n’est que de 0,51%. Cette situation contraste avec le début de panique, corrigé dans la matinée, qui s’est emparé des marchés d’action et de l’inquiétude générale sur la situation en Grèce et en Europe que traduisent les commentaires de la presse. Dans ce contexte l’appel au calme des dirigeants politiques relève du bon sens mais ne suffira pas. Jusqu’à présent, la France a été peu touchée    par les évènements grecs, qu’il s’agisse du refinancement de sa dette ou de son activité économique. Mais les enjeux à plus long terme sont bien plus inquiétants.

Les taux bas, n’en déplaisent aux « alarmistes », sont là pour durer, qu’il s’agisse des taux à court terme, du fait de l’action de la Banque Centrale Européenne qui n’est pas près de s’inverser, surtout dans le contexte actuel, ou des taux à long terme. La raison en est simple, bien que passée complètement sous silence : le taux d’épargne financière des ménages bat records sur records : il a atteint  6,5% du revenu disponible brut au 1er trimestre 2015, soit un niveau très proche, sinon supérieur aux déficits publics (4% du PIB). Tout ce passe donc comme si l’épargne des français était suffisante pour couvrir les déficits français. Dans la réalité, du fait de l’inter-connection des marchés financiers, cela ne se passe pas comme cela puisqu’à travers l’intervention de l’assurance-vie en France et des fonds de pension ailleurs en Europe, les Français, comme tous les européens financent ensemble les dettes publiques européennes. Mais c'est un signe fort d'équilibre bilantiel de notre pays.

En outre, les émissions à moyen et long terme étant à taux fixe, le bénéfice de la baisse des taux durera jusqu’à l’échéance de ces prêts, dix ans voire bien plus. Les économies budgétaires qui en résulteront seront donc certaines et durables. Le choc politique causé par la crise de la dette grecque n’aura donc pas eu, à ce jour, les conséquences désastreuses que d’aucuns, en réalité les adversaires de l’euro, pronostiquaient. Mais les dommages à plus long terme sont, eux, bien réels et inquiétants.

Ce que révèle cette crise, c’est un formidable recul de l’idée européenne, non seulement chez les peuples, chaque consultation électorale le montre, mais aussi, et c’en est la cause principale, chez les dirigeants européens eux –mêmes. Quand un fonctionnaire international peut dire publiquement que des responsables démocratiquement élus d’un Etat souverain ne se comportent pas comme des « adultes », sans que cela déclenche de réactions de leurs homologues, on mesure la chute du respect mutuel que se doivent entre eux ces dirigeants.

Quand  des responsables politiques prétendent que leurs ressortissants ne doivent pas être  appelés à combler les déficits d’autres pays alors qu’ils savent pertinemment que ce ne sera pas le cas, tout simplement parce qu’une part significative des dettes publiques est désormais financée par la création monétaire de la BCE, création qu’ils ont eux-mêmes approuvée, on mesure le fossé qui s’est creusé entre ceux qui avaient bâti un projet qui a assuré au continent  70 ans de paix et de prospérité et ceux qui dirigent l’Europe aujourd’hui.                            

C’est cette inconscience des enjeux, cette sourde oreille aux aspirations populaires partout en Europe qui est la principale menace qui pèse sur le projet européen, bien plus que que la mauvaise gestion de la Grèce, qui ne date pas d’aujourd’hui et sur laquelle ces mêmes dirigeants ont fermé les yeux pendant des années.

Quant à la France, elle a bâti son avenir économique et son pacte social sur la réussite de l’Europe où se trouvent ses principaux clients, sur l’avantage, notamment en termes de coût de financement de son économie, que constituent le marché et la monnaie uniques. La crise grecque, avec ses conséquences sur l’avenir de l’Europe, fait, ni plus, ni moins, peser une menace majeure sur notre projet de société. On serait d’ailleurs curieux de connaître les réactions des partis politiques qui recommandent la sortie de l’euro face à la situation apocalyptique devant laquelle se trouve la Grèce : fermeture des banques et de la Bourse, contrôle des changes. Iront-ils jusqu’à maintenir cette proposition jusqu’aux prochaines élections présidentielles avec le risque que l’un de leurs candidats soit présent au second tour ? Imagine-t-on les répercussions sur la vie quotidienne des français, à l’image de ce qui se passe aujourd’hui à Athènes, que cela occasionnerait à ce moment-là ?

Le pire n’est pas toujours sûr mais ce qui l’est, c’est l’impérieuse nécessité, pour tous ces dirigeants, de se ressaisir.

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