Vous n'êtes pas encore inscrit au service newsletter ?

S'inscrire

Se connecter

Mot de passe oublié? Réinitialiser!

×

AB 2000 Site d'analyse

Le blog d'Alain Boublil

 

Comment va la Chine ?

Avec le tourbillon médiatique créé par les tweets de Donald Trump, les difficultés de l’Angleterre à gérer les conséquences de son choix de sortir de l’Union Européenne et le coup de foudre de l’opinion mondiale pour le nouveau président français, l’actualité relative à la Chine est passée au second plan. L’abaissement de la notation de sa dette souveraine par l’Agence Moody’s n’a eu aucune conséquence et les nombreux déplacements à l’étrangers de ses dirigeants, le plus souvent accompagnés de la conclusion d’importants projets financés par Pékin, n’attirent pas davantage l’attention. A la fin du mois à Dalian, grand port situé au bout d’une presqu’île au nord de Pékin, et qui avait été rebaptisé Port-Arthur par les Anglais, avant d’être occupé par le Japon puis par la Russie, se tiendra le « Summer Davos » qui attirera nombre de dirigeants économiques. Cela ne semble pas susciter beaucoup d’intérêt en France. La ville étant jumelée avec Le Havre, il faut espérer l’attention de nos responsables politiques et de nos chefs d’entreprises se réveillera.

Le pays, dont on a prédit si souvent l’affaiblissement, poursuit sa trajectoire de croissance et réoriente progressivement son économie en faveur des services et de la demande intérieure. Les chiffres du 1er trimestre ont été supérieurs aux attentes puisque le PIB a cru de 6,9% et rien ne laisse supposer que le deuxième trimestre marque un fléchissement significatif. La consommation d’électricité, qui est un bon indicateur de l’activité, s’est accrue de 6,4% par rapport à 2016, depuis le début de l’année. Ce chiffre est d’autant plus important qu’il intervient à un moment où plusieurs secteurs industriels, fortement consommateurs d’énergie, sont en pleine restructuration et où le dynamisme des services semble durable et revêt différentes formes. A Shanghai, 70% de la croissance est dû au développement des activités qui feront bientôt de la ville une véritable capitale financière pour toute l’Asie. Ailleurs, c’est l’essor du tourisme. L’augmentation des investissements dans les services atteint 11,6% depuis le début de l’année soit trois points de plus que l’ensemble des investissements et à un moment où le gouvernement a entamé le processus de réduction des surcapacités dans la production de charbon et d’acier. La croissance chinoise devrait donc bien se situer en 2017 dans la fourchette de 6,5 à 7% fixée par le gouvernement et a même prise de l’avance au 1er semestre.

Ce n’est pas surprenant. Une échéance politique majeure attend le président Xi Jinping avec la réunion du Congrès du parti communiste chinois à l’automne qui doit statuer sur la reconduction  pour cinq ans de son mandat. L’action gouvernementale est donc focalisée sur la réussite de la politique économique à la veille de cet évènement.. La consommation des ménages accélère, avec le développement des achats en ligne et cette croissance est riche en créations d’emplois : leur nombre a atteint six millions soit 220 000 de plus que sur la même période de l’an dernier. Ce contexte favorable permet aussi d’entamer la restructuration des entreprises publiques. Des rapprochements sont ainsi à l’étude entre les grands producteurs d’électricité, avec pour objectif de favoriser la mutation du mix électrique en faveur du gaz naturel et des énergies renouvelables pour réduire la dépendance au charbon dont la combustion est la principale cause des émissions de CO2 et de la dégradation de l’environnement dans les grandes villes.

Les critiques portant sur l’endettement excessif des collectivités locales et de nombreuses entreprises publiques ne sont pas étrangères à la décision de Moody’s d’abaisser la note souveraine du pays. Mais les gigantesques réserves de la banque centrale chinoise, qui ont dépassé 3 000 milliards de dollars et qui sont alimentées par l’excédent persistant des comptes extérieurs du pays, constituent, aux yeux des marchés financiers une garantie suffisante. Le fait que Pékin soit le premier détenteur de la dette américaine, avec 1000 milliards de dollars placés en Treasury Bonds, ne laisse personne indifférent et traduit bien le basculement vers l’Asie et en premier lieu vers la Chine de l’épargne mondiale. La devise chinoise, depuis les incidents de l’été 2015 où les maladresses de la banque centrale avaient déclenché une vague spéculative, est désormais stable face à un panier de monnaie. Le yuan n’a accompagné que très partiellement le dollar dans sa baisse depuis trois mois. Les bourses de Shanghai et surtout de Hong Kong sont en forte hausse depuis le début de l’année.  Les sorties de capitaux, permises par le processus en cours d’internationalisation, qui avaient été interprétées comme un signe de défiance face à la situation du pays, ont servi, en réalité, pour une large part, à financer les acquisitions à l’étranger réalisées par des entreprises chinoises au point qu’en Europe on commence à s’en inquiéter. Ce sera l’un des sujets abordés au Sommet de Bruxelles qui ce tient en ce moment.

Ces sorties de capitaux profitent aussi au développement des pays voisins, dans le cadre de la stratégie économique et diplomatique connue sous le nom de « Belt and Road Initiative ». Reprenant le modèle historique de la Route de la Soie, les dirigeants de la Chine favorisent la croissance de pays partenaires, en finançant de vastes programmes d’infrastructures, lesquelles sont réalisés en grande partie par des entreprises chinoises. Le pays gagne sur tous les tableaux. A court terme, cela donne du travail à l’industrie chinoise et à long terme, ces pays deviendront des clients et continueront ainsi à soutenir leurs exportations. La diplomatie économique chinoise depuis quatre ans est entièrement mobilisée autour de ce vaste programme qui s’étend à l’Afrique et au pourtour de la Méditerranée. Pékin a même créé à cette fin, une nouvelle institution financière, la Banque asiatique pour l’investissement et les infrastructures, la BAII. Elle regroupe déjà près de 80 pays qui ont souscrit à son capital et elle concurrence directement la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement.  

Après être devenue en une génération une grande puissance économique, le Chine poursuit sa voie maintenant pour devenir une grande puissance financière. L’internationalisation du yuan s’amplifie. A l’automne dernier, le FMI l’a inclus dans le panier des monnaies de réserves. La Banque Centrale Européenne vient de mettre en pratique cette reconnaissance officielle et a acquis pour l’équivalent de 500 millions d’euros en devises chinoises, pris sur ses réserves en dollars. C’est un premier pas symbolique mais qui en annonce d’autres qui contribueront à  traduire dans les faits le statut de monnaie de réserve du Yuan. Peu après, MSCI, qui fournit le principal indice boursier pour les marchés émergents, a inclus dans ses indices des actions chinoises cotées sur le marché intérieur à Shanghai et à Shenzhen. Cette nouvelle étape dans la reconnaissance internationale des actifs financiers chinois a soutenu la hausse des cours des actions de ces entreprises.

En dépit des commentaires systématiquement alarmistes ou pessimistes, la Chine continue donc d’apporter à la croissance mondiale sa contribution positive. Dans la compétition économic mondiale, comme dands les batailles militaires, les alliances jouent un rôle essentiel. Renoncer à des alliances avec des groupes chinois serait une erreur.  Les entreprises françaises feraient bien d’en prendre conscience. Il n’est pas trop tard pour nouer des partenariats stratégiques ou des alliances profitables à chaque partie. Le « Summer Davos » de Dalian pourrait en fournir l’occasion.    

Commentaires

Pas de commentaires.

Vous devez vous inscrire pour poster un commentaire : se connecter